CHIENNES DE GARDE

de Dalhia de la Cerda

Création des épisodes 1 &2

les 16 et 17 octobre 2025 la Salle Noire, Grenoble

UNE PRODUCTION DE LA COMPAGNIE LES VOISINS DU DESSOUS

 

LECTURE FEUILLETON

Mise en espace de Pascale Henry

Avec Marie Bonnet, Marie Champion et Alice Pitoizet

Et Cumbia, rap, reggaeton et corridos pour les accompagner

Cette lecture-feuilleton que la compagnie se propose de porter aux oreilles du public est le fruit d’une lecture fascinée par l’originalité et la force de ce texte qui déploie sans complaisance des portraits de femmes de tous âges dans le Mexique contemporain, où naitre femme n’est pas sans difficultés ni sans danger.

« Une jeune héritière d’un empire narco fait construire une tombe digne d’un palace à sa meilleure amie assassinée ; une migrante tuée revient à la vie, bien résolue à se venger de ses agresseurs ; une sorcière invoque le seigneur des Ténèbres pour se débarrasser de sa voisine et de ses chiens qui défèquent dans son jardin ; une femme devient tueuse à gages pour subvenir aux besoins de sa famille…

Qu’ e lles soient femmes au foyer, influenceuses, trafiquantes, riches ou pauvres, les héroïnes de Chiennes de garde sont déterminées à résoudre leurs problèmes par elles-mêmes, car elles savent que, s’il y a bien une chose sur laquelle elles ne peuvent pas compter, c’est sur l’aide de Dieu. »

(Les éditions du sous-sol)

Composé de 13 récits écrits à la première personne, la langue qui s’y déploie, féroce autant que pleine d’humour et de vitalité, invite immédiatement à l’oralité, puisque qu’adressé à un interlocuteur fictif.

La présence physique de ces héroïnes est parfaitement créée par la langue comme par la rythmique qu’ elle insuffle et imaginer ces récits portés par des comédiennes, rencontre bien des perspectives artistiques de la compagnie.

Donner voix, ici à des femmes dont on n’ a pas souvent l’occasion d’entendre la parole et qui rejoignent toutes celles qui en sont privées.

Livrer un combat avec la détresse et la violence en tentant d’y répondre avec des œuvres qui nous arrachent aux seules ténèbres, ici rien de victimaire malgré la férocité des récits.

Faire l’expérience physique d’une langue et de ce qu’elle est en capacité de saisir, et celle de Dahlia de la Cerda est ici magistrale.

 

Une soirée en épisodes avec pause conviviale

Composée de trois épisodes, la soirée est suspendue à chaque début de l’épisode suivant  par un moment de convivialité offert aux spectateurs avant qu’ils aient le choix de suivre les prochaines aventures de ces héroïnes du quotidien ou pas.

 

Dans la composition du roman de Dalhia de la Cerda, certains récits viennent répondre à d’autres, renversant ou entremêlant les points de vue et créant la surprise. C’est ce qui a inspiré cette forme, tout comme le contenu de ces histoires qui plongent l’imaginaire dans des situations hors normes et des aventures où la vie quotidienne est digne d’un film tourné par Tarantino.


A Propos du roman de Dahlia de la Cerda

 

« …Avec cette multiplicité des expériences, le truc un peu punk qu’ on devine, qui fait penser à Despentes parfois quand on la lit : dans la manière d’accueillir dans sa langue celle des autres, d’autres femmes qui proviennent de classes diverses et dont les expériences diffèrent à ce titre mais qui dans le fond prennent en commun un risque : celui que constitue l’unique fait d’être une femme, dans un pays par ailleurs tristement connu pour le nombre effroyable des féminicides qui ponctuent son quotidien.

… l’ écriture au ras d’une expérience dont la banalité n’ ôte pas la douleur, mais au contraire, la place dans une perspective singulière et révoltante, qui est dans le fond, celle que nous impose ce chœur de femmes : c’ est horrible, mais c’ est comme ça. »

Chronique France Culture

 

« ..Révoltée par la violence qui assiège toute vie de femme dans son pays, l’autrice et activiste mexicaine Dahlia de la Cerda se montre impitoyable face aux discours médiatiques et sociaux, usant d’une remarquable habileté tactique et d’une féroce ironie pour les démonter par la fiction.

Dahlia de la Cerda écrit sur et contre la violence, qu’ elle retourne comme un gant – de boxe – ou comme une arme verbale.

Son travail sur les voix de ses héroïnes doit beaucoup à la finesse de son oreille, à son attention aux parlers régionaux, à la subversive stylisation de discours stéréotypés de la culture pop.

Une authentique bande sonore – écrite – accompagne le recueil tout entier, chansons tex-mex, des cumbias, du rap, du reggaeton, des corridos – narcos ou traditionnels – dans lesquels se réverbèrent les péripéties vécues par les personnages.

On rit, de toutes les couleurs du rire, on rit aux larmes. Le titre original du recueil en dit long sur la nature de notre propre catharsis et sur celle, avant tout, des lectrices mexicaines ou latino-américaines de Dahlia de la Cerda : Perras de reserva renvoie, bien sûr, à Reservoir Dogs de Tarantino.

La nouvelle se fait litanie, poème, liste, cri. Debout, les mortes ! »

Florence Olivier, En attendant Nadeau

Photos Olya Gorbouchine

Extrait :

« …J’ avais pas un rond : dans mon village je vivais à la rue de chez rue, dans la putain de misère : je dormais dans un hamac, j’ avais toujours des vieilles tongs en plastique et je mangeais des restes de poissons. Aucun avenir, zéro. Aucun endroit où le chercher, sérieux.

…Moi on m’ a juste dit qu’ à Juarez il y avait du travail, dans les usines et les maquilladoras, que l’ambiance était trop cool, tous les soirs la teuf, et ça m’ a fait tourner la tête.

Je n’ ai prévenu personne : un jour ça m’ a pris, je suis allée sur les rails, j’ai pris de l’élan et j’ai atterri ici avec tous mes rêves. Juarez est comme un immense ranch, je te jure. Un ranch avec un tas de miséreux, et des bagnoles que quand tu les vois tu te dis, le man, là c’est carrément un narco. Et des chaussures suspendues au câbles électriques. Chaque coin a son style de godasses : sur la côte des tongs, vers l’intérieur des terres, des baskets, et ici des bottes de cow-boy, trop drôle. On est vraiment un peuple de rigolos. Mais ici à la frontière, on suspend aussi des croix roses, en mémoire des petites mortes de Juarez, et il y a plus d’affichettes de gamines disparues que de boites de nuit, c’est ce qu’ on m’ a dit.

Pas de chance pour moi qui suis venue pour les discothèques, et qui n’ ait trouvé qu’ un salaud de désert qui dévore les femmes, les coupe en morceaux, les fait disparaitre, les avale. Ni vu ni connu. Mais moi, je suis pas bête, j’allais pas me faire avoir. … »

Biographie

Dahlia De la Cerda a étudié la philosophie à l’Université autonome d’Aguascalientes (es).

En 2009, elle remporte le concours littéraire Letras de la Memoria à Aguascalientes.

Six ans plus tard, en 2015, elle devient boursière du Programme de stimulation de la création et du développement artistique (PECDA) avec le projet Nos femmes mortes ont un nom, un livre électronique distribué gratuitement composé de dix textes narratifs sur les féminicides au Mexique. Ce projet deviendra son livre d’histoires Perras de Reserva.

En 2016, elle devient boursière du Fonds national de la culture et des arts (FONCA) avec un projet de récit et de recherche sur les femmes en prison et la criminalité féminine du point de vue du féminisme intersectionnel. À la demande de son tuteur, elle change l’ orientation du projet vers l’écriture « d’histoires sur la criminalité féminine, sur des femmes abjectes qui échappent au canon des bonnes femmes ».

En 2018, elle est à nouveau boursière du FONCA avec un projet narratif sur la situation des femmes vivant en périphérie des villes et la féminité : femmes malades, criminelles, transsexuelles et racisées. L’histoire Persil et Coca Cola  a été publiée dans l’anthologie FONCA cette année-là.

En 2019, elle remporte la deuxième place du prix Raquel Berman et remporte le Prix National de la Jeune Histoire Comala avec le livre de nouvelles Perras de Reserva. En 2021, elle participe au volume collectif Tsunami, coordonné par Gabriela Jáuregui et publié par la maison d’édition Sexto Piso.

En 2022, Sexto Piso (es) réédite Perras de Reserva avec quatre histoires ajoutées aux neuf originales. Le livre est ainsi constitué de treize chapitres, qui se répondent. Ils sont écrits à la première personne, chacun par une femme très différente des autres, victimes ou auteures de violences.

Son dernier livre est le recueil d’essais Desde los zulos (Sexto Piso, 2023), intitulé d’après la chronique qu’ elle a commencé à publier sur le site Internet de son éditeur en 2022.

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